Zelikha Dinga, cuisinière et fondatrice de Caro Diario.
“J’ai une cuisine simple, généreuse, qui nourrit”
Le Monde de RÉUNI explore l'univers, le parcours et les points de vue d'artisans, d'artistes, d'entrepreneurs, de personnalités des industries créatives et culturelles qui contribuent à la préservation et à la valorisation des savoir-faire et qui influencent d'une manière ou d'une autre notre esthétique et notre art de vivre.
C'est dans son appartement du 18e arrondissement de Paris que Zelikha Dinga nous reçoit pour nous parler de sa cuisine, de littérature et d’Italie. Son monde intérieur est sobre mais pensé. Chez elle, qu’il s’agisse du mobilier, des vêtements ou des ingrédients de sa cuisine, tout est sélectionné avec soin. Casanière, son espace de vie et de travail se mélangent avec comme même panorama le ciel.
Celle qui se définit comme cuisinière - et non comme cheffe dont la connotation n’inspire pas la sympathie d’après elle - a fait ses armes à Londres avant de se lancer à son compte à Paris. Sa cuisine se veut simple et précise, mais elle n’en est pas moins généreuse, inspirée et singulière. Chaque produit est réfléchi, choisi et raconte une histoire, car il est souvent question de narration dans le travail de Zelikha.
Amoureuse de l’Italie et de sa douceur de vivre, ce n’est pas un hasard si elle a choisi de nommer son entreprise de catering Caro Diario (Cher Journal) en clin d'œil au film du réalisateur italien Nanni Moretti. Rencontre avec cette épicurienne joviale.
Zelikha, pourrais-tu te présenter en dehors de ton cadre professionnel, d’où tu viens et où est-ce que tu as grandi ?
Je suis Zelikha, j’ai 32 ans, je suis née à Paris dans 11e, j’ai grandi dans le 10e, j'ai eu mon premier appartement dans le 9e et je vis aujourd’hui dans le 18e, je suis une Parisienne pur jus. J'ai grandi ici très classiquement et j'ai fait mes études ici.
Nous sommes chez toi, peux-tu nous parler de cet endroit…
Le monde intérieur
J'habite dans le 18e, juste en dessous de Montmartre, au-dessus du cimetière. On est dans mon appartement, dans le salon qui est une belle pièce, il y a un côté salle à manger avec une grande table en bois, une bibliothèque, deux fauteuils et un canapé. Comme je suis cuisinière, il y a aussi un frigo professionnel qui est allumé quand j'en ai besoin, j’ai intégré cela à mon espace de vie. C’est un appartement que l’on a refait l’année dernière, on habite ici depuis cinq ou six ans. Je crois que maintenant, il est à notre image, il n’est jamais parfaitement rangé, c'est souvent le bazar, il y en a toujours un peu partout parce que je cuisine, parce qu'il y a des bouquins partout, des magazines, de la vaisselle parce que je bosse d'ici. J'adore cet endroit, il est très agréable.
Est-ce qu’il y a des objets que tu affectionnes particulièrement ?
Il y en a plein, car nous avons tout choisi “from scratch”. Cela fait longtemps que nous sommes ensemble avec Yann, mais je crois qu'il n’y a quasiment aucun objet que l’on avait avant d'être en couple. Tout ce que l’on a ici, on l’a choisi ensemble. Un objet dont je peux parler, c'est ce tableau de Yann Kebbi qui est un artiste, un peintre et un illustrateur français, il fait beaucoup d’illustrations pour des magazines comme Le Monde. J'adore son travail et ce tableau, c’est un peu la rencontre de plusieurs hasards, il se trouve que sur cette grande peinture, c’est un musée imaginaire qui ne contient que des reproductions d’une série d'œuvres de Cézanne qui s’appelle la Sainte-Victoire. Cézanne a peint dans le sud de la France, une montagne qui s'appelle la Sainte-Victoire et il se trouve, et c’est un pur hasard, qu’avec mon compagnon, nous allons depuis des années, tous les étés, dans la même maison, dans un village qui s'appelle Vauvenargues et qui est face à la Sainte-Victoire. Donc, quand j’ai vu ce tableau dans une galerie, il m’a interpellée, je n’ai pas tout de suite vu la référence à Cézanne, car elle n’est pas si évidente, mais quand j’ai vu le lien, je suis tombée amoureuse.
C’est l’objet que tu emporterais si tu devais quitter les lieux en urgence ?
Oui, je crois, mais je suis aussi très attachée à cette table. Nous l’avons fait fabriquer par un menuisier en Pologne et je l'aime beaucoup.
Est-ce que c’est vous qui l’avez dessinée ?
Non, ce n’est pas nous qui l'avons dessinée, on s'est inspiré d’objets déjà existants. Moi, je ne sais pas du tout dessiner du mobilier donc non. Pour le reste des objets, finalement, nous avons un intérieur parisien assez classique. Le seul truc que je voulais quand on a refait l’appartement, c’est une vraie bibliothèque, car je suis très attachée aux livres. Je voulais une bibliothèque dans le salon, dans laquelle on voit nos livres, avant tout était dans le bureau, il y avait une double rangée, il fallait chercher alors que là, tout est visible, on sait ce que l’on a. Je voulais une bibliothèque qui soit comme suspendue au mur.
D’où te vient cet attachement aux livres ?
Cela vient du fait que ma maman était libraire. J’ai baigné dedans toute mon enfance, et un peu trop à mon goût d'enfant d’ailleurs, à tous mes Noëls et tous mes anniversaires, je recevais des livres. J’ai grandi sans télévision, il n’y avait que le livre qui existait à la maison.
D’ailleurs, il n’y a pas de télé ici…
Il n’y a pas de télé ici, je n’aime pas l’objet télé. Je crois que l’on est un peu des reproductions de nos parents, dans le modèle éducatif, il y a des choses qui restent. Je n’aime pas l’objet écran, je ne trouve pas cela très joli.
Mais il y a un Mac…
Il y a un énorme Mac oui, c’est ici que l’on regarde nos films et j’ai aussi acheté un petit vidéoprojecteur.
Si tu devais garder un livre ?
Un de mes auteurs favoris, c’est Philip Roth, qui est un auteur américain, new-yorkais il a beaucoup écrit sur son enfance. Il est de religion juive, il a beaucoup écrit sur le New Jersey et le New York qu’il a connu. Il a aussi beaucoup écrit sur le monde littéraire et le monde enseignant. C’est l’un de mes auteurs favoris, je l’adore. Il y a aussi Harry Potter, que j’adore.
Est-ce qu’il y a un livre de Philip Roth que tu aimes plus que les autres ?
J’ai épousé un communiste, c’est un très beau livre. C’est une histoire d'a priori, d’amour, c’est très beau.
Il y a deux grandes enceintes chez toi… La musique c’est important pour toi ?
La musique c’est hyper important pour moi, mais je t'avoue que moi, je me suis toujours contenté d'écouter de la musique sur des petites enceintes portatives. Mais, Yann, mon compagnon, est fou de son, il adore la musique et pour lui c'est très important d'avoir une bonne qualité de son, donc il a de superbes enceintes et un ampli. Ce sont un peu les seules choses luxueuses que l’on a chez nous, on a juste ces enceintes et cet ampli.
Il y a aussi quelques œuvres d’art, il n’y en a pas beaucoup, mais elles sont choisies…
Oui, ce que tu vois ici, c’est à Yann, c’est une lithographie d’Hans Hartung, elle est magnifique, elle m’inspire beaucoup. Ici, il y a une peinture de mon ancien beau-père, Jérôme Mitonneau. C’est très différent de ce qu’il fait d’habitude, il fait un travail à la craie en noir et blanc, assez sombre et là c’est abstrait, il y a une sorte de terre, de globe étiré, ou de tête de crapaud, ça dépend de la façon dont on le regarde.
Il y a aussi des sièges de Mies Van der Rohe…
Oui, exactement, c’est Mies Van der Rohe, c’est édité par Knoll. Ce sont des fauteuils sur lesquels j'avais craqué et qui coûtent une fortune, on les a trouvés en seconde main. Yann adore chiner, moi je déteste ça. Lui, il aime beaucoup ça et il trouve des choses incroyables.
Et ce petit pouf ici, c’est marrant…
Oui, c’est un pouf du designer Fritz Hansen. Il avait fait un canapé iconique et avec les chutes de cuir, ils ont fabriqué ce petit pouf.
Tu nous montres le reste de l’appartement ?
Ici, nous sommes dans l’entrée, ce n’est pas la pièce la plus intéressante, mais elle est assez vaste. Quand on a refait l'appartement, l’architecte a suggéré de ne pas toucher à l'entrée. On aurait pu gagner de l’espace, mais on a décidé de lui faire confiance et je trouve que c’est cool. Les moulures sont très belles dans l'appartement, très simples, très sobres et c’est quelque chose dont on se rend compte dès l’entrée. Ici, il y a notre chambre, elle est très simple, c’est un pentagone, elle a cinq côtés. Il y a juste un lit, des placards, des choses empilées un peu partout.
Et il y a un super luminaire…
C'est un luminaire que l’on a acheté en ligne, d’ordinaire je n’aime pas trop acheter des choses sans les avoir vues avant. Nous l’avons acheté neuf en plus, sur un site allemand très tech. Ce n’est pas un objet de designer que l’on a vu dans un magazine, mais il est très cool, et il fait deux sortes de lumières différentes. Une lumière très blanche et une autre plus chaude.
Et il y a plein de sacs…
Oui, je pense que je cache des choses dans des sacs pour m'en occuper plus tard.
Ce ne sont que des sacs que je connais… Il y a Amélie Pichard, Fane..
Tu connais Fane ? Je les adore ! Je les ai rencontrées il y a quelques mois et j’adore ce qu’elles font. J’imagine qu’il faut beaucoup de courage pour se lancer dans le prêt-à-porter ou la maroquinerie quand on est indépendant. Amélie Pichard et Fane, ce sont des filles que j’admire pour cela, ce sont de superbes entrepreneuses, elles sont très attentives aux chaînes de production, à la provenance du cuir, à la qualité. Ce sont deux esthétiques différentes, mais il y a de la place pour tout le monde et elles sont incroyablement talentueuses.
Et derrière il y a aussi le petit sac Céline…
C’est un beau cadeau que j’ai eu à mes 30 ans, en plus du tableau. La anse est complètement usée car je le mets partout, je le traîne partout toute l'année. Je ne voulais pas un sac trop précieux dont il faut prendre soin parce que généralement, je suis à pied, en bus ou en vélo, je cours dans tous les sens et j'ai envie de pouvoir remplir mon sac et celui-là, il est parfait.
Et là je vois une salle de bain majestueuse…
Je suis ravie qu’elle te plaise. Lorsque mon frère est venu ici pour la première fois, il s’est fichu de moi et il m’a dit que ma salle de bain ressemblait à celle de Kim Kardashian, ce n’était pas du tout le mood board que j’avais donné pour la salle de bain (rires). C’est une salle de bain avec deux très beaux éléments en marbre vert. La vasque qui est taillée dans le meuble de l'évier, dans le même morceau de marbre et un rappel avec l'étagère du dessous. Ensuite, nous avons la pierre de douche et le petit banc, j’adore m’asseoir dans la douche, alors j’ai demandé à ce que l’on installe cette assise. Autant je m’ennuie vite dans le bain, autant après une longue journée, s'asseoir sous la douche, c’est cool.
Surtout que tu fais un métier dans lequel tu es tout le temps debout…
Oui, je fais un métier dans lequel je suis tout le temps debout, mais finalement de moins en moins, parce que je passe de plus en plus de temps assise, à faire des rendez-vous téléphoniques ou à faire des devis (rires).
Est-ce que tu es satisfaite de la couleur dans ta salle de bain, est-ce que ça vieillit bien ?
Cela ne fait que six mois que nous avons cette salle de bain donc c’est difficile à dire.
Nous commençons à voir quelques traces de calcaires, mais l’avantage c’est que comme le marbre est veiné de blanc, il peut y avoir une méprise. On en prendra soin et on verra comment cela vieillit.
Une routine beauté peut-être (rire) ?
Non plus, je me maquille trois fois par an et ces fois-là, je m’endors avec mon maquillage (rires).
Tu es au naturel…
Oui, au naturel, je mets une crème le matin et c’est tout. C’est une crème anti-âge en plus.
Je profite que l’on soit dans ta chambre pour parler un peu de vêtement. Quelle est ta relation aux vêtements ? Tu as beaucoup de sacs…
Je n’ai pas beaucoup de sacs, tu as vu tout ceux que j’avais donc je n’en ai pas beaucoup. Je n’ai pas beaucoup de vêtements non plus, tout ce que j’ai, qui tient sur cintre, est ici. Je n’ai pas une garde-robe d’hiver et une garde-robe d’été, tout est là et je le porte toute l’année. J’aime bien les pulls, donc j’ai quelques pulls.
Quels sont tes pulls préférés ?
Celui que je porte aujourd’hui, je l’adore, c’est Isabelle Marant. J’ai trois pulls de chez Isabelle Marant. Le matin, ma routine est simple, je prends un jean, un tee-shirt blanc et c’est parti. J’aime bien les casquettes aussi.
Tu as une belle collection de casquettes…
Oui, j’aime beaucoup, pour mes 30 ans, j’ai offert une casquette aux 30 premiers invités.
Quelle est ta pièce fétiche ?
Je porte souvent des vestes. En ce moment, je porte une veste avec un col haut. Je trouve que la veste, c’est une pièce qui fait toujours bien le job même avec un jean, un t-shirt blanc, une chemise, elle habille vraiment les tenues les plus simples. Pour les vêtements, j'achète à 80 % du vintage. Comme je l’ai dit tout à l'heure, je n’aime pas chiner, tous mes vêtements, je les achète à la même fille qui s'appelle Emma et qui est fantastique. Elle a monté son compte qui s'appelle Em Archives avec uniquement des pièces des années 90, sa sélection me plaît toujours donc je ne me pose pas de questions, je sais qu'il y aura toujours des choses qui vont me convenir chez elle. Ma mère était coquette, mais pas du tout du genre à s’habiller chez des créateurs, je ne viens pas d’une famille où c’est important, de s’habiller et pour tout ce qui est considéré comme superficiel. Finalement, je viens d’une famille de lecteurs, où tout ce qui est important c’est d’être assis et de lire, même la cuisine ce n’est pas du tout un truc familial. Mais en tout cas, moi, j'aime bien les vêtements et j’aime bien m'habiller. Je me lasse très vite, sur les dix dernières années il y a quand même très peu de pièces que j'ai gardées, celles que j'ai gardées, ce sont des basiques, une chemise blanche, un jean.
Comment t’habilles-tu dans ton quotidien, dans le monde professionnel ?
Dans le monde professionnel, c’est jean, paire de crocs, de sabots ou de Birkenstock. Souvent, je porte aussi les Blundstone si je suis à l'extérieur. J'en suis très contente parce qu'elles sont faciles à enfiler, faciles à enlever et sur le vélo, je n’ai pas peur de les abîmer.
On sort de ta chambre, tu m’emmènes où ?
Dans la cuisine.
Le monde extérieur
Tu travailles ici tout le temps ? Ton monde intérieur et extérieur sont mixés ?
Je suis casanière, j’adore être chez moi et j’adore travailler de chez moi. Je me lève le matin, je me douche pour Alexa, ma stagiaire, tout de même (rires), ensuite, je viens dans la cuisine, c’est mon endroit et je l’adore. J’aimerais parler de la vue, c'est important pour moi parce que j'ai travaillé dans des cuisines de restaurant comme je suis cuisinière et c'est très rare de voir l'extérieur, de voir le ciel, d'avoir de la lumière naturelle dans une cuisine. En ce moment, l'activité se développe beaucoup, il faudrait que je prenne un laboratoire, mais j'ai du mal à me dire que je vais devoir retourner dans un endroit sans lumière, avec des néons blafards qui dépriment. Quand je travaille, ce que je vois en permanence, c’est le ciel et c'est très agréable, cela permet de rêver, il y a quelque chose de très poétique dans le ciel. Et en plus, on donne sur un endroit de Paris qui est très beau, qui est méconnu et qui s'appelle la Cité des Fusains, c’est un ancien atelier d'artistes. Aujourd’hui, ce n’est plus accessible, ce sont des lofts et ce n’est pas que pour les privilégiés, car cela va du petit duplex de 40 m² au grand loft de 300 m². Donc, nous avons une vue assez dégagée, c’est charmant, c’est n’est pas une vue parisienne habituelle.
Tu as les toits de Paris alors que tu n’es qu’au troisième étage… Et puis l’été, il y a les arbres, le parc…
Oui, et juste derrière il y a le cimetière de Montmartre. On voit peut-être quelques tombes d’ici. Notre ancien appartement était aussi à Montmartre, nous avions une vue sur cour, nous n’avions aucune lumière et c’était horrible. Quand on a changé d’appartement, c’était mon premier critère, il fallait un endroit où l’on peut voir quelque chose.
Tu es cuisinière, comment tu te définis ?
Je ne sais pas. En tant que cuisinière, j'ai toujours un peu le syndrome de l'imposteur, je pense que c’est lié à ma personnalité, mais je suis cuisinière. Je n’utilise pas le mot chef, car je n’aime pas trop ce mot, je ne le trouve pas très sympathique, mais mon métier c’est bien d’être chef. Généralement, quand je me présente, je dis que je suis cuisinière. J'ai monté ma boîte de catering et on fait un peu plus que juste du traiteur, c’est un peu galvaudé ce que je vais dire, mais on propose une expérience au client. Je n’ai jamais fait deux prestations qui étaient identiques, on propose toujours des menus différents. On propose aux marques de travailler à partir de leur identité. Dans dix jours, la Fashion Week commence, nous avons deux prestations pour deux marques et on leur propose des choses très différentes avec des univers qui matchent avec leurs collections et qui elles sont.
Quelles sont ces marques ?
Il y a une marque qui va se lancer, c’est une marque de chaussures qui n’existe pas encore et il y a une autre marque qui est américaine, de prêt-à-porter qui s’appelle Ulla Johnson.
Donc, pour les marques, je fais toujours quelque chose de très différent. Je travaille aussi beaucoup pour des particuliers, par exemple, samedi prochain, on fera un mariage. C’est un très beau projet, les deux mariés sont adorables. Je sais qu’ils sont venus vers moi car ils voulaient quelque chose d’assez original, une belle scénographie de table. Je suis cuisinière, mais je me suis aussi développée en pâtisserie, en autodidacte. Si nous allons sur mon compte Instagram, qui s'appelle Caro Diario, ce que l’on va voir c’est cent pour cent du sucré et j’adore cela, nous l'avons beaucoup développé mais ce n’est clairement pas cette activité qui me fait vivre.
Qu’est-ce qui t’a amenée à la cuisine ?
Jusqu’à il y a peu de temps, je disais toujours que c'était un hasard, et puis finalement plus je me rends compte que non, j'ai l'impression de refaire un film policier et de voir les indices qui m'ont menés ici. Avant, l’histoire que je racontais, c’était que j'aimais bien cuisiner et qu’à un moment donné mon copain allait être muté à Londres et j’allais le suivre. J'avais plutôt fait des études littéraires à Paris, et il fallait que je trouve un métier à Londres, mais je n’allais certainement pas pouvoir travailler dans une librairie anglaise parce que je n’ai pas le niveau en anglais nécessaire pour travailler dans ce domaine. Je me suis demandée ce que je pouvais faire à Londres, sans un niveau trop élevé d’anglais et que je n’oserais pas faire à Paris, c'était la cuisine. Et puis j'ai continué, et en fait, la vérité, c'est que j'aime cuisiner depuis que je suis petite, que je suis gourmande depuis que je suis petite et j'adore cela, j'adore manger. Récemment, je me remémorais mon enfance dans la librairie de ma mère, je passais mon temps à éplucher les livres de cuisine, à un moment donné, j'avais dû lui demander de prendre à la maison deux livres, un sur les pâtes et un sur le chocolat. Il se trouve qu’aujourd’hui, je suis obsédée par l’Italie, j'y suis allée une vingtaine de fois, j'y vais au moins deux fois par an. Donc ça vient de loin, ça ne vient certainement pas de mes parents qui ne cuisinaient pas du tout et en plus, je n’avais pas le droit de manger de sucre à la maison parce que ma mère a une alimentation hyper diététique. J'ai peut-être fait une petite frustration. À l’adolescence, mes parents se sont séparés et j’ai eu un beau-père qui cuisinait très bien et qui cuisinait beaucoup. J’ai découvert la cuisine avec lui, c’est la première personne que j’ai vu couper un oignon, déglacer une poêle. Je n’ai pas trop la Madeleine de la grand-mère qui cuisine, ce n’est pas du tout mon histoire, mais j'ai appris un peu toute seule et j'ai appris parce que j'étais une vraie gourmande et que j'étais obsédée par la cuisine.
Comment est-ce que l’on fait ses classes ? Comment trouve-t-on son identité ?
C’est une bonne question, je ne sais même pas si j'ai une identité. C’est quelque chose que l’on me dit souvent quand on voit mon compte Instagram, il y a vraiment une identité très cohérente. J'ai l'impression, parfois, d’en apprendre plus sur moi via le regard des autres. J’ai commencé à travailler dans un restaurant, ensuite, j’ai fait une école de cuisine à Paris. J’ai continué à travailler dans des restaurants, j’ai adoré, j’ai appris beaucoup de choses. J'ai aussi travaillé à Londres. Au bout d’un moment, j’ai saturé du rythme de la restauration. C'est assez classique, je n'apprends rien à personne, c'est un rythme extrêmement difficile qui n’est pas du tout naturel, un rythme de coupure, on travaille de 9h à 15h puis on reprend pour travailler de 18h à 00h00, c’est un non-sens. Ensuite, j'ai été embauchée par une famille pour être chef à domicile de toute la famille, les parents n’arrivaient pas à faire manger des légumes à leurs trois enfants. Je me suis rendu compte aussi qu'il était possible de gagner sa vie en faisant de la cuisine autrement que dans un restaurant et autrement qu’en souffrant. C’est difficile à dire, car il y a plein de belles choses dans la restauration, mais c’est aussi un modèle de souffrance, il faut se faire violence. Donc, après le job avec cette famille, je me suis dit que j’allais continuer, travailler à un rythme qui me convient. J’ai eu la chance de pouvoir le faire. Il faut le dire, l’économie de la cuisine, c’est un sujet important, les salaires dans la cuisine sont très bas, on ne peut pas vivre avec un gros SMIC toute sa vie à Paris. J'ai la chance d'avoir un compagnon qui a un métier rémunérateur, ça m'a permis de me lancer, de créer mon activité. Si j'avais été aux abois financièrement, je n’aurais pas pu créer Caro Diario et passer autant de mois sans me payer.
D’où ça vient Caro Diario ?
C’est un film de Nanni Moretti, c'est un réalisateur italien, il est fantastique, je l’adore. Il a fait beaucoup de films, très dur, notamment La chambre du fils qui parle d’un deuil, il a eu la palme d'or pour Habemus Papam. Caro Diario, c’est un film très beau, très léger, qui se passe dans la Rome de la fin des années 90. Il joue dans ses propres films et le premier plan, c’est lui sur son Vespa, sur un son de Rachid Taha, il est en train de descendre les rues de Rome, c'est très beau, c'est le printemps, il y a du jasmin, c'est fleuri. J’aime beaucoup ce film et j'aime beaucoup l'Italie. Caro Diario ça veut dire cher journal et je trouve qu’il y a une belle narration.
Tu voyages beaucoup ?
Je vais énormément en Italie. Avec mon compagnon, nous sommes fous d’Italie donc on y va régulièrement, c'est même un peu pitoyable à la fin parce qu’il y a plein d'autres pays que l’on ne découvre pas. Il y a une douceur de vivre en Italie, c’est encore dans son jus. C’est un pays qui a résisté aux aspects les plus néfastes de la modernité. Tu vas dans certaines villes et tu as l’impression d’être au 20e siècle, il y a une beauté et une simplicité. Il y a plein d’endroits dans lesquels il n’y a pas toutes les chaînes alimentaires ou de prêt-à-porter. Il y a un amour du petit commerce de proximité, il y a des marchés fabuleux, une agriculture qui a été préservée. Je pense que les Italiens aiment leur pays et prennent le soin de faire de belles choses, de rénover les immeubles. On se sent bien en Italie, et puis surtout, on y mange bien.
Comment appréhendes-tu tes voyages en Italie ?
Je demande souvent des bonnes adresses même si maintenant pour l’Italie, c’est moi qui donne les bonnes adresses. Je suis allée énormément à Turin, j'y ai aussi vécu sur des petites durées entre un et trois mois donc c'est une ville que je connais très bien. Quand j'y vais, je ne prépare pas grand-chose, je réserve dans mon restaurant préféré quand j'arrive. Pour les autres villes, ça dépend, quand on est en saison touristique, je prépare parce qu’on est obligé, les endroits sympas sont pris d'assaut. Quand on voyage hors saison, on se laisse aller, si on a envie de rester une ou deux nuits de plus c'est possible, et si on a envie de partir plus tôt que prévu, c'est aussi possible. Pour les restaurants, je me fie beaucoup à des recommandations, que ce soit des guides culinaires ou des amis qui sont chefs. C’est rare que je passe la porte d'un restaurant sans savoir où je vais. Je fais attention à la nourriture parce que j'aime manger. En janvier, on est allés au Mexique pendant deux semaines et j’ai réservé les restaurants en avance.
Est-ce que tu t’inspires de tes voyages dans ta cuisine ?
L’Italie oui énormément. Le Mexique, franchement, non.
J’ai l’impression que c’est souvent décevant le Mexique sur la nourriture…
Je suis allée à Tulum il y a cinq ans et j’avais très bien mangé. Il y a le pop-up du Noma qui est un restaurant étoilé à Copenhague, il y avait une vraie vague de foodies qui venaient manger à Tulum donc il y a de très bons restaurants. En janvier, à Mexico City, nous avons très bien mangé, c’était incroyable. Après, nous sommes allés en Basse-Californie du Sud et la nourriture n’était pas géniale, mais on n’y allait pas pour cela, on y allait pour voir les baleines (rires).
Comment décris-tu ta cuisine ?
Ma cuisine, c'est une cuisine très simple. J’aime les très bons ingrédients. Ce que je dis souvent, c'est que mon plat préféré, ce sont les pâtes à la poutargue. La poutargue, c’est des œufs de poisson salés et séchés. C’est très salé, très iodé, très fort en goût. Je fais des pâtes à la poutargue, il y a de l’huile d’olive, de l’ail, de la poutargue et c’est tout. C’est délicieux, car la poutargue, c’est un plat en soi. Je n’ai pas envie de me décrire en contradiction, mais je n’aime pas la cuisine qui part dans tous les sens, je n'aime pas la cuisine avec trop de choses dans l'assiette, une déclinaison ou un dôme. J’ai une cuisine simple, généreuse, qui nourrit. S’il y a un zeste de citron sur ma salade, je veux que le citron soit délicieux, s’il y a un anchois dans une sauce, j’aime sentir le goût de cet anchois. J’adore la cuisine française traditionnelle, j’adore le pot-au-feu, j'adore faire un pithiviers au foie gras, j'adore les sauces, les crèmes au beurre, faire mes bouillons, faire un fumet de poisson. J’aime pouvoir sentir le goût de quelque chose, j’aime qu’il y ait une ligne.
Est-ce que tu as des rôles modèles cuisinières ou cuisiniers ?
L’un de mes chocs culinaires lorsque je suis arrivée à Londres, plus visuel et esthétique que gustatif, c'était Ottolenghi. Quand on est arrivés là-bas, et que je suis passée les premières fois devant ses boutiques, et que je voyais ses étals magnifiques de pâtisseries, je me suis dit que c’était vraiment super. Ottolenghi, c’est un peu bateau comme réponse, mais je pense qu’il a influencé toute une génération de cuisiniers qui maintenant, mettent du zaatar dans une salade, il a amené cette cuisine Middle East. C’est un individu que je ne connais pas du tout humainement, je n’ai jamais vu de vidéos de lui, mais j’ai ses livres de cuisine et c’est une inspiration. Je connais très mal les chefs français et je ne fais pas du tout la course aux étoilés. Je suis allée manger dans quelques étoilés, mais la cuisine d'étoilés traditionnelle où l’on passe 4h à table, j'avoue que ce n’est pas trop ma came. Ma seule expérience incroyable, c'était à Copenhague, dans un restaurant qui s'appelle Kadeau. Je me suis dit que l’on pouvait passer 4h à table, ne pas sortir en roulant et avoir expérimenté quelque chose d’incroyable, cela m'a réconciliée avec la cuisine d'étoilés. Ensuite, je dirais qu’aujourd'hui, mes rôles-modèles sont des personnes qui m'inspirent. Une fille comme Céline Pham par exemple, je trouve qu’il y a dans sa cuisine, une force, une originalité, une identité. Je n’ai pas envie de lui accoler une identité, mais je trouve que lorsque l’on voit son travail on se dit que c’est du Céline Pham. C'est beau, c'est juste et c'est poétique. Je dirais que les gens qui m'inspirent le plus aujourd'hui, ce ne sont pas ceux qui font de la performance culinaire mais plutôt ceux qui mettent en sens dans leur cuisine, qui expliquent des choses, qui font attention aux ingrédients qu’ils utilisent. Des personnes pour qui il y a une narration. Cuisiner, c'est facile, mais cuisiner humainement, de façon correcte, responsable et avoir une ligne à laquelle on se tient, c'est ce qui est difficile et c’est ce que je valorise. Après, en termes d’inspiration, il y a une cuisinière que je cite souvent, c’est Laila Gohar, ce qu’elle fait est sublime, on est plus proche de l’art que de la cuisine.
Qu’est-ce qui fait qu’un plat est Caro Diario ou Zelikha ?
Je ne sais pas, je pense qu'il faudrait poser la question aux personnes qui mangent ma cuisine plus qu'à moi. Je ne peux pas ne pas parler du sucré, car nous en faisons énormément. Avec ma stagiaire Alexa, à Noël, nous avons sorti une cookie box, il y a dix jours, nous en avons fait une autre pour Gucci. On fait beaucoup de sucré et on nous appelle beaucoup pour faire des opérations sucrées hyper mignonnes, assez léchées visuellement. Je dirais que c'est des recettes très simples, par exemple la boîte que l’on a réalisé pour Gucci, c'était des biscuits italiens, très traditionnels, très simples, à base de poudre de fruits secs avec des supers ingrédients. J’aime bien aussi les gros gâteaux crémeux.
Comment fais-tu pour garder la ligne ?
C’est une bonne question, je n’ai pas de réponse. A mon avis c’est très provisoire, je pense qu’il va y avoir un changement de morphologie bientôt. Je ne fais pas de sport mais mon compagnon fait des trails, il court 40km tous les matins, donc je lui dit de courir pour moi (rires).
C’est quoi ton plat signature ?
Les cookies. Le produit avec lequel Caro Diario s’est fait connaître, ce sont les cookies. J’ai commencé pendant le premier confinement, à vendre des cookies dans le 18e arrondissement, un cookie chocolat noisette qui a bien fonctionné. Après le confinement, j’ai commencé à le vendre dans tout Paris, à le livrer et j’ai même eu de la presse.
Si RÉUNI était un plat, qu’est ce que ce serait ?
Vous avez une image hyper simple, hyper pure, j’ai en tête votre cardigan avec les gros boutons, les grosses mailles, il y a aussi les t-shirts aux lignes très épurées donc ce serait un plat simple, un plat sincère parce que j'ai l'impression que votre démarche est éthique. J'ai le bouillon du pot-au-feu qui me vient en tête, le pot-au-feu, c’est l’un de mes plats préférés parce que j'adore voir ce bouillon avec les légumes qui sont très distincts les uns des autres. Il y a le blanc transparent du navet, l'orange de la carotte, le vert du poireau. Il y a quelque chose de simple et épuré, et à la fois nourrissant, réconfortant, mais pas lourd et pas gras, on peut avoir envie de le manger tout le temps. C’est un bon basique et j'amènerai le twist avec un zeste d’orange sicilienne.
Pour finir sur ce lieu, nous sommes entre la cuisine de ménagère et la cuisine professionnelle…
Oui, je suis une ménagère professionnelle. Il fallait quand même que ce soit une cuisine d'appartement parce que nous vivons ici. À un moment donné, je m'étais dit que j’allais faire une cuisine en inox complet mais ça aurait été un choix un peu lourd à assumer dans un appartement parisien. Du coup, on garde de l’inox sur les plans de travail, et puis j’ai mis des façades en bois. Cette cuisine, elle n’a pas toujours été comme cela, il y avait les toilettes que l’on a cassé et cela nous a permis d’avoir un beau cube. La cuisine est grande pour une cuisine parisienne, je crois qu'elle fait 10 mètres carrés de mémoire. Il y a un évier en inox, un robot de cuisine, des placards et des tiroirs en bois un peu partout où il y a tout mon matériel de cuisine. J'ai aussi un stock en bas dans la cave, j'ai une cave avec plein d'autre matériel et plein d'autres ingrédients. Il y a aussi une très belle gazinière SMEG que j'adore.
Tu souhaites l’emmener où ce projet ?
J'ai envie de continuer à travailler de façon très libre, j'ai envie de continuer à rencontrer plein de gens. Caro Diario ça m'a permis de rencontrer plein de clients trop cools. J'ai eu l’appui et le soutien d'autres femmes qui se sont intéressées à mon projet et qui m'ont donné une superbe visibilité. Une fille comme Clara Cornet qui m’a beaucoup soutenue, elle me commande beaucoup de gâteaux. Il y a Amélie Pichard aussi, nous avons fait une collaboration ensemble en janvier sur des galettes, elle m’a beaucoup encouragée. J'ai envie de continuer à faire ce que j'aime, c'est-à-dire cuisiner, rencontrer des gens cools. L’une de mes plus belles rencontres de l'année 2021, c'est Alexa, ma stagiaire. Je ne l'aurais jamais rencontrée si je n’avais pas créé Caro Diario. J'ai la chance d'être sur des projets sur lesquels je peux travailler une chose à la fois. C’est important pour moi de pouvoir prendre le temps, les projets que l’on fait demandent beaucoup de tests donc c’est du temps et beaucoup de recherches, beaucoup d'expérimentation, c’est un luxe de pouvoir travailler à ce rythme et je crois que c’est là que j’ai envie d’amener Caro Diario.
C’est beaucoup de travail en amont…
C’est vrai que c’est très difficile pour le public et pour mes clients de se rendre compte du travail qu’il y a derrière. Parfois, les clients pensent que je leur fais un devis en dix minutes, que je saute en cuisine, que je fais à manger pour 70 personnes en 3h et ce n’est pas cela. Le travail de préparation est énorme, on recherche énormément d'images et d’inspirations. Parfois, il y a des clients qui nous envoient des mood boards, mais parfois, c'est nous qui leur envoyons. Il y a énormément de tests, pour un gâteau par exemple, on peut faire une journée de recherche. Il faut faire des tests, parfois, c’est raté, parfois le sucre cristallise mal et il faut comprendre pourquoi, il faut refaire la recette dix fois avant de la maîtriser. Parfois, il faut s’y prendre en avance pour trouver des ingrédients ou des moules très spécifiques. Par exemple, à Noël, nous sommes allés chercher les moules à biscuit en Suisse. Cela demande aussi beaucoup de compétences, par exemple, il y a beaucoup de recherches sur Internet, je crois que je regarde environ quinze tutos par jour. Et c’est seulement après tout cela, qu'arrive la phase d'exécution, le passage en cuisine et c’est une partie du processus, ce n’est pas l’ensemble. Donc c’est beaucoup de travail et je suis contente d'avoir travaillé en restauration pour cela, car dans ce milieu tu apprends à faire des charrettes et travailler pendant deux semaines d'affilée dormir 4h par nuit et travailler 18h par jour pour délivrer quelque chose.
Tu aimes ça ?
Oui, mais ponctuellement. Par exemple, à partir de maintenant, je rentre dans deux semaines très intenses, mais après je pars une semaine à la montagne pour faire un petit break. C’est ça qui est vraiment cool dans le fait d’être indépendant, c’est de travailler à ton rythme, de pouvoir enchaîner et puis au bout d’un moment être plus cool et pouvoir relâcher. Je suis à la fois une énorme bosseuse, mais aussi une énorme paresseuse. J’adore me donner à fond, mais j’adore aussi dormir, bouquiner, chiller et ne rien faire.
Qui souhaiterais-tu entendre dans ce podcast ?
J’ai une de mes copines qui s'appelle Sacha Marot, j’aime beaucoup son travail. Elle est photographe, j’adore son regard et la façon dont elle travaille, elle est très discrète et ne parle pas beaucoup de son travail donc j’adorerais l’entendre en parler.
Références :
Le compte Instagram de Zélikha Dinga : https://www.instagram.com/carodiario_paris/?hl=fr
Le compte Instagram de Yann Kebbi, illustrateur : https://www.instagram.com/yannkebbi/?hl=fr
La collection de fauteuils Mies Van der Roeh edité par Knoll : https://www.knoll.com/shop/classics/mies-van-der-rohe-collection
Les sacs d’Amelie Pichard : https://ameliepichard.com/fr/
Les sacs Fane : https://www.instagram.com/fane.officiel/
La sélection vintage d’Am Archives : https://www.em-archives.com/shop
Le compte Instagram de Laila Gohar : https://www.instagram.com/lailacooks/?hl=fr
La sélection Em Archives : https://www.instagram.com/em__archives/
Le site du chef anglo-israélien Yotam Ottolenghi https://ottolenghi.co.uk/
La cuisine de Céline Pham : https://www.instagram.com/celine_pham_/
Caro Diario, Nanni Moretti : https://en.wikipedia.org/wiki/Caro_diario