The Wear About de Kitesy Martin

Ce mois-ci, nous nous sommes rendus dans l’atelier de Kitesy Martin, créatrice de bijoux précieux. Pendant quelques heures, nous avons pu découvrir ses inspirations, échanger sur sa manière de créer et de vivre, comprendre son rapport au geste et s'imprégner de son amour pour le bijou. Et c’est vrai qu’il y a quelque chose de particulièrement beau, de naturel, de vivant et de touchant chez Kitesy. Ses créations, mêlant éléments de stocks dormants et métaux précieux, sont d’ailleurs le reflet de tout cela. Un portrait à lire sans modération.

RÉUNI. Si tu devais te présenter sans carte d’identité : qui es-tu, où as-tu grandi et que fais-tu aujourd’hui de tes mains et de ton temps ?
KITESY. Je suis Kitesy Martin Lefort, je suis designer, j'ai 41 ans et je vis à Paris. J'ai grandi en région parisienne, à Colombes, et fait mes études d’arts appliqués à Olivier de Serres et aux Arts décoratifs de Paris. Aujourd'hui, je dirige la marque KITESY MARTIN STUDIO que j'ai lancée fin 2018. Je passe mon temps entre mon studio de création et mon appartement avec ma famille.
R. Nous sommes ici dans ton univers, chez toi. Qu’est-ce qui te retient dans cette ville, ce que tu aimes y respirer, y observer ?
K. Tout me retient ici ! J'ai toujours aimé Paris. Je me souviens encore de mes premières visites parisiennes avec ma mère à 3 ans, quand on partait voir les vitrines des grands magasins en train. 15 minutes nous séparaient de la gare Saint-Lazare et elles ont été les plus longues de mon adolescence. Depuis 15 ans, je suis une vraie Parisienne et je confirme que j'adore cette ville. Elle m'inspire au quotidien, j'aime sa petitesse physique et sa grandeur culturelle. Tout faire à pied et croiser des œuvres d'art ou des événements à chaque coin de rue, c'est ça Paris.
R. Ton environnement — ton atelier, ton intérieur, une ville ou un souvenir — semble nourrir ton esthétique. Comment dialogue-t-il avec ta façon de créer ?
K. C'est un dialogue quotidien et de chaque instant. J’ai besoin d'être entourée d’objets que je trouve beaux. Je regarde beaucoup ce qui m'entoure et je prends le temps d'observer. Avec le temps, mes yeux sont devenus des scanners et cherchent le beau partout. J'aime voir des gammes de couleurs n’importe où : dans la rue, dans un appartement, dans un plat... Un canapé rouge aux encombrants devant une devanture de magasin marron et proche d'une poussette jaune pâle : voilà comment je construis une gamme couleur et comment tout ce qui m’entoure nourrit ma créativité.

R. Y a-t-il un objet ou un rituel qui symbolise ton art de vivre ?
K. Un objet qui symbolise mon art de vivre serait sans doute un bijou fantaisie. Une pièce de notre dernière collection comme le collier « bébé serpent » que je porte avec tout et facilement. J’essaye toujours d'être chic et effortless à la fois. C’est exactement ce qui qualifie ce bijou.
R. Qu’est-ce qui a été le plus décisif au moment de lancer ta marque et laboratoire créatif Kitesy Martin Studio : un courage, une intuition, un manque que tu voulais combler ? Est-ce qu’il y a un moment fondateur où tu as senti que c’était ta manière de t’exprimer ?
K. J’avais déjà passé plusieurs années en tant que styliste dans quelques maisons. Je finissais toujours par m’ennuyer. En créant une marque de bijoux, on ne fait pas que du design. On réfléchit à une stratégie, une communication, une image, un plan de collection, un management d’équipe... Chaque jour est différent et j’ai l’impression d’apprendre sans cesse. C’est ce qui me manquait et ce que je suis venue chercher en créant Kitesy Martin Studio.

R. On parle peu des mains derrière un bijou. Quel est le geste que tu aimes le plus répéter à l’atelier ? Et celui qui te résiste encore ?
K. Ce que je préfère, c’est faire un croquis à main levée et rapide pour exprimer mon idée de design. Je dessine beaucoup avec mon doigt dans mes notes iPhone dès qu’une idée arrive, pour garder une trace. Le geste qui me résiste est sans doute celui d’une finition de tressage (un élément de l’ADN Kitesy Martin Studio). Je suis exigeante pour la qualité de mes pièces, mais je n’ai pas la patience d’un artisan. Heureusement que je suis entourée de personnes dont c’est le métier et qui exécutent parfaitement ce travail.
R. Un bijou peut être une armure, un grigri, une déclaration. Pour toi, que porte-t-on vraiment quand on porte un bijou ?
K. Je dis souvent que la mode donne des pouvoirs magiques. Les bijoux me donnent le pouvoir de me sentir cool et cela me donne des points de confiance. Je ne sors JAMAIS sans boucles d’oreilles. Avec elles, je me sens mieux que sans elles : c’est leur pouvoir magique.

R. Si les bijoux sont une extension de toi, quel est ton uniforme au quotidien ?
K. Mon uniforme est avant tout confortable et pratique. Un jean large, un t-shirt, un gilet (comme le cardigan Réuni que je ne quitte plus) et beaucoup de bijoux superposés pour apporter du sophistiqué.

R. Est-ce que tu te souviens de la première fois où tu t’es sentie bien dans un vêtement ? Et pourquoi ?
K. Je m’en souviens très bien. J’étais lycéenne et j’ai décidé du jour au lendemain de ressembler aux filles que je trouvais cool. Je me souviens même que ce déclic s’est fait en regardant un édito du magazine Muteen (qui n’existe plus aujourd’hui). J’avais adoré les looks de cette série photo. Je me suis dit : « Je veux être cette personne » et je me suis promise d’être comme elle chaque jour en allant au lycée. Le look était composé d’un baggy, d’une chemise, d’une cravate, d’un pull sans manches et d’un blouson en cuir. Plutôt simple à reproduire. La mode m’a aidée à sortir de ma coquille et ce look de lycéenne est le point de départ de ma relation avec le vêtement.

R. Est-ce que ton rapport aux vêtements a évolué avec le temps ?
K. Oui ! Surtout depuis que j’ai un enfant. Le confort est la priorité et en même temps j’aime me sentir dans l’air du temps. C’est une balance que je cherche tous les matins. Plus jeune, la mode l’emportait sur le confort, aujourd’hui c’est l’inverse.

R. Un geste appris, hérité, pour t’habiller ?
K. Ma mère m’a appris à « marier les couleurs ». Finalement, un outfit très simple peut devenir très fort en mariant des couleurs inattendues. Aussi, j’aime beaucoup modifier les volumes simples en les nouant avec un élastique.

R. Un mot pour décrire l’esprit RÉUNI, sans jamais parler de vêtement ?
K. Chaleureux.
R. Et si tu devais composer une silhouette RÉUNI pour quelqu’un que tu aimes : que choisirais-tu ?
K. Le gilet Milano noir avec le pantalon Milano noir. Un look monochrome simple qu’on peut porter en toutes circonstances selon les bijoux et accessoires qu’on lui associe.







